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CE QU’IL FAUT RETENIR DE LA NOUVELLE LEGISLATION SUR LA CONFORMITE SOCIALE DES PROJETS AU CAMEROUN

      8108304-12644149Le 04 juillet 2022 dernier, le Premier Ministre chef du gouvernement du Cameroun a signé un décret N°2022/5074/PM fixant les modalités de contrôle de la conformité sociale des projets.

           Selon l’article 3 de ce texte gouvernemental, la conformité sociale des projets renvoie à l’ensemble des mesures d’accompagnement social prises aux plan institutionnel, juridique et technique en vue de contrôler et de maîtriser les risques humains et sociaux des projets. Son objectif étant de protéger les populations en général, et les personnes socialement vulnérables en particulier, contre les conséquences humaines et sociales néfastes générées, directement ou indirectement, par les projets privés et publics conformément aux dispositions de l’article 2.

             Ce nouveau décret qui fixe les mesures applicables en matière de conformité sociale des projets au Cameroun, allant de la consécration des principes sociaux, aux sanctions en passant par le contenu de la conformité, son contrôle et son suivi apporte quelques clarifications.

          Clarification des compétences en matière de contrôle de la conformité sociale des projets

          L’une des particularités de ce nouveau décret est qu’il attribue la charge de contrôle de la conformité sociale des projets au Cameroun au Ministre chargé des affaires sociales selon les dispositions de l’article 2 en lieu et place du Ministère de l’Environnement, de la Protection de la Nature et du Développement Durable qui assurait le suivi des aspects environnementaux et sociaux des projets en liaison avec les autres administrations.

        Le décret N°2022/5074/PM du 04 juillet 2022, fixant les modalités de contrôle de la conformité sociale des projets, précise clairement qu’il abroge les dispositions antérieures contraires contenues notamment dans le décret n°2013/0171/PM du 14 février 2013 fixant les modalités de réalisation des études d’impact environnemental et social, et le décret n°2013/0172/PM du 14 février 2013 fixant les modalités de réalisation de l’audit environnemental.

          Le décret du 04 juillet 2022 vient clarifier et consacrer le rôle du ministère en charge des affaires sociale en tant qu’institution en charge du contrôle de la conformité sociale des projets.

Du certificat de conformité environnementale au certificat de conformité environnementale et sociale

      Selon l’article 16 de ce décret, il est désormais délivré un certificat de conformité environnementale et sociale signé par les Ministres en charges de l’environnement et des affaires sociales.

        Au terme de l’article 17, le certificat de conformité environnementale et sociale est une pièce requise pour l’octroi du visa de maturité pout tout projet d’investissement public. Cette innovation contribuera à rendre obligatoire les évaluations d’impact environnemental pour les projets initiés par le secteur public. Il faut relever que le décret sur les études d’impact environnemental prévoyait déjà une obligation de réalisation de l’évaluation environnemental avant le démarrage de tout projet. Mais dans la pratique, plusieurs administrations exécutent des projets sans avoir réalisé une étude d’impact environnemental. La question est de savoir si l’exigence prévue à l’article 17 rendra plus effective l’obligation de réalisation et de validation préalable de l’évaluation environnementale.

Un texte plus coercitif que le décret de 2013 sur les études d’impact environnemental

         Contrairement au décret de 2013 qui ne prévoit de sanctions que pour le démarrage d’un projet en l’absence de réalisation d’une étude d’impact environnemental, le décret du 04 juillet 2022 prévoit des sanctions liées à la non mise en œuvre des mesures prévues dans l’étude d’impact social, les clauses sociales du cahier des charges, l’audit social, le plan d’accompagnement économique et social des populations riveraines ; le plan de protection des populations autochtones vulnérables. Ces sanctions sont : le retrait du rapport de contrôle social favorable ; la suspension et la déchéance du droit de conduire l’implantation et l’exploitation du projet concerné ou de tout autre projet.

            Tout agent de contrôle de la conformité sociale des projets coupable de faux dans la rédaction d’un rapport de contrôle social favorable ou d’un procès-verbal de constatation des fautes encourt l’une des sanctions suivantes : la réduction, la suspension ou le retrait de la prime dédiée aux agents en charge du contrôle de la conformité sociale des projets ; l’inéligibilité temporaire ou définitive, selon les cas au contrôle de la conformité sociale des projets.

Une limite importante : l’absence des dispositions relatives à l’institution de l’attestation de respect des obligations sociales

         Le décret du 04 juillet 2022 ne prend pas en compte le besoin de plus en plus croissant des promoteurs d’obtenir des attestations de réalisation effective des mesures environnementales et sociales. C’est une exigence de plusieurs bailleurs de fonds et d’organismes de certification. C’est ce qui a amené le Ministère en charge de l’environnement à délivrer des attestions de respect des obligations environnementales et sociales. Cette attestation est requise pour la délivrance des certificats de légalité des opérateurs forestiers dans le cadre du régime d’autorisation FLEGT et utile pour les entreprises engagées dans les processus de certification privée. La question est de savoir comment les opérateurs ou promoteurs attesteront-ils qu’ils ont réalisé leurs obligations sociales ? Le décret aurait pu instituer une attestation de réalisation des obligations sociales ou exiger la validation préalable du Ministère en charges des affaires sociales pour l’octroi d’une attestation de réalisation des obligations environnementales et sociales en cas de conformité sociale des projets et que celle-ci soit délivrée conjointement par les ministres en charge de l’environnement et des affaires sociales. En l’absence le procès-verbal du dernier contrôle dont copie doit être adressée au promoteur peut faire foi. Mais que faire si la durée entre deux missions de conformité sociale des projets est anormalement longue faute de moyens financiers mis à la disposition des agents en charge du contrôle de la conformité sociale des projets ? Dans le même esprit qui a prévalu pour l’institution du certificat de conformité environnementale et sociale, les rédacteurs du décret auraient pu insérer dans les pièces exigées pour la délivrance de l’attestation de respect des obligations environnementales et sociales, le procès-verbal de la dernière mission de contrôle sociale du projet datant de moins de 6 mois.

             En définitive, La question qui se pose est donc celle de savoir si ce changement de compétence ministérielle en matière de contrôle de conformité sociale des projets au Cameroun garantira une meilleure effectivité des mesures prises sur terrain au point de permettre aux populations riveraines de pouvoir bénéficier du respect de leurs droits.

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