Prévue par le Draft du plan d’aménagement de la réserve de Biophère du Dja (2018/2022), la délimitation des zones d’intérêt cynégétiques à gestion communautaire (ZICGC) reste une préoccupation majeure pour les populations autochtones, les communautés locales ainsi que pour les conservateurs surtout après ces longues années de conservation. On entend par Zones d’intérêt cynégétique (ZIC) des espaces de conservation et d’exploitation de la faune, dans lesquelles sont organisées des activités de chasse, de tourisme et des activités récréatives ou scientifiques. Elles sont généralement divisées en plusieurs catégories dont les principales sont : les zones d’intérêt cynégétique et les zones d’intérêt cynégétiques à gestion communautaire dont le but est de promouvoir l’exploitation et l’utilisation durable des ressources fauniques par les populations autochtones et communautés riveraines aux aires de conservation de la biodiversité.
Au regard de l’article 53 du Décret n°2005/495 du 31 décembre 2005 modifiant et complétant certaines dispositions du décret N° 2005/099 du 6 avril 2005 portant organisation du ministère des forêts et de la faune, la direction de la faune et des aires protégées est chargée, entre autre, de la création et du suivi de la gestion des zones cynégétiques, des game-ranches et des zones d’intérêt cynégétique à gestion communautaire. Cette disposition de l’article 53 a été prise en compte par le gestionnaire de la réserve de biosphère du Dja, puisque selon le draft du plan d’aménagement, trois (3) zones d’intérêt cynégétiques auraient été créées.
Cependant, les populations autochtones et communautés locales ne connaissent ni les limites de cette zone et ni les objectifs qui ont été assignés à ces zones. Tout ce qu’elles savent c’est que :
« Le projet de la conservation et les UFA ont réduit à plus de 90% l’espace d’activités des populations autochtones (Baka’a surtout et les Bantu aussi) qui, avant la conservation et les UFA, n’avaient pas de limites en forêt et pouvaient se déplacer d’un lieu à un autre. Aujourd’hui, tu fais un pas on te dit que tu es dans UFA, tu es dans la réserve, tu es dans la forêt communale, (…). Les activités d’autonomisations ne sont pas mises en œuvre. On vient, on fait des sensibilisations à un projet de formation agropastorale et après on ne voit plus personne. On initie les choses et on ne les suit pas. Pourtant les restrictions sont de plus en plus croissantes. […] pour dire vrai, les Baka’a ne sont plus à l’aise » (remarque une autochtone responsable d’une association humanitaire basée à Lomié).
L’avis de cette observatrice indépendante corrobore avec les déclarations des populations autochtones Baka’a et Bantu de la zone d’antenne Est. En effet, elles disent « on nous dit qu’il y’a une zone réservée à la chasse, mais partout où on t’attrape avec les gibiers, on arrache et on te conduit en prison, nous ne savons même pas ou on doit chasser et ou on ne doit pas chasser ».
Un responsable du service de la conservation confie qu’« en réalité, il n’y a pas des territoires de chasse communautaire (TCC), ni des zones d’intérêt cynégétiques à gestion communautaire (ZICGC) en dehors des espaces environnant les campements et les habitats des communautés ». Le draft du plan d’aménagement parle de « l’absence des territoires de chasse communautaires (TCC) et de ZIGGC » parce que ces zones ne sont pas clairement définies et leur existence demeure toujours informelle et imaginaire.
Cette situation de floue autour de la délimitation de ces espaces de chasses communautaires est une source de frustrations pour les communautés autochtones qui sollicitent des espaces dans lesquels elles peuvent chasser en toute sécurité et sans crainte pour perpétuer leur identité socioculturelle centrée autour de la chasse, de la pèche et de la cueillette. Le grand braconnage et le conflit entre les conservateurs et les « seigneurs de la chasse » sont aussi certaines des conséquences de ce floue dans la « partition » de la réserve de faune du Dja entre ces différents espaces de gestion et de cogestion surtout du côté de l’antenne Est.
Par Alain DJAWA WALIDJO, stagiaire
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